Présentation Chaplin / Sennett

Charlie Chaplin et ses débuts au cinéma

Charles Spencer Chaplin est un acteur, réalisateur, scénariste, producteur et compositeur de musique né le 16 avril 1889 dans les bas-fonds de Londres, avec une incertitude quant au lieu précis de naissance. 

Il est né presque en même temps que le cinéma, en 1895 les frères Lumière présentaient le 28 décembre 1895 leur première séance publique au Grand Café sur les grands boulevards à Paris.

Charlie Chaplin est né d’une famille d’artistes, une mère faisant du théâtre et d’un père chanteur au music-hall. Deux ans après sa naissance le couple se sépare.

A 14 ans, sa mère est internée dans un hôpital psychiatrique.

Charlie Chaplin a un frère ainé nommé Sydney (1885-1965), celui-ci le suivra dans son parcours d’acteur en Amérique, il mourra bien avant Charlie Chaplin.

Les deux enfants sont souvent placés dans des orphelinats dans leur petite enfance.

A l’âge de 5 ans Charlie Chaplin monte déjà sur les planches et s’amuse à imiter la voix de sa mère.

C’est décidé, il sera comédien !

Sydney lui préfère partir comme apprenti marin dans un premier temps puis revient sur son choix et sera lui aussi acteur de théâtre.

Tous les deux sont engagés dans la troupe de Fred Karno, Charlie Chaplin a alors 19 ans et tous les deux signent un contrat de trois ans.

Charlie Chaplin dira lui-même qu’il travaillait sans relâche, car le talent ne suffit pas pour réussir dans ce métier, il dit : 
« Je peaufinais ma technique sans cesse pour améliorer mon jeu de comédien comme on polit des pièces de métal avant de les placer dans un mouvement d’horlogerie ! »

Lors de deux tournées à New-York, Charlie Chaplin est remarqué par un jeune producteur de cinéma à la recherche de nouveaux talents, c’est Mack Sennett qui vient tout juste de fonder la Keystone Compagnie en 1912.

Parlons un petit peu de ce pionnier du cinéma muet.

Michael Sinnott, dit Mack Sennett est acteur et cinéaste, né le 17 janvier 1880 à Danville au Québec et décédé le 5 novembre 1960 à Woodland Hills en Californie.

Il devient l’un des réalisateurs les plus importants du cinéma muet américain révélant des acteurs comme Charlie Chaplin, Mabel Normand, Fatty Arbuckle, Harry Langdon et Ben Turpin pour les plus connus.

Il débute au cinéma à la Biograph Company de New York, et fonde les Studios Keystone à Edendale en Californie, studio possédant le premier plateau de cinéma entièrement clos. 

La Californie est en plein essor industriel, il y a de la place à Hollywood pour les nouveaux entrepreneurs de cinéma, la ville profitant d’un climat favorable et d’un ensoleillement suffisant pour filmer en lumière naturelle.

Mack Sennett devient ensuite célèbre pour ses comédies « slapstick » qui signifie « farces bouffonnes » dans lesquelles l’humour implique une part de violence physique volontairement exagérée.

On y retrouve aussi les fameux « Keystone Cops » des policiers de fiction, vulgaires, hystériques, incompétents qui sont tournés en dérision et dont Mack Sennett raffolait. 

Il y rajoute ses « Bathing Beauties », des jeunes filles en maillots de bain qui n’ont d’autres fonctions que de se pavaner à l’écran et dont beaucoup réussiront une carrière d’actrice par la suite.

Dans les années 1910 la technologie des caméras était rudimentaire, les films qu’on logeait à l’intérieur ne dépassaient pas 100 mètres de pellicule soit à peu près 5 minutes de tournage. Ce format nécessitait de réaliser des films très courts ce qui correspondait bien aux films burlesques.

Les caméras n’avaient pas de moteur électrique, le caméraman utilisait une manivelle entrainant la pellicule, celui-ci devait garder une cadence régulière au rythme de 18 images par seconde sans quoi le film serait inexploitable. Cela compliquait fortement leur tâche !
Elles ne couraient pas les rues, c’est la Société Edison qui en détenait les brevets d’exploitation et qui louait, en petit quantité, leur matériel aux compagnies de cinéma naissantes.

Il faudra attendre l’année 1917 pour voir la dissolution de ces brevets.

Les scènes étaient tournées soit à l’extérieur avec des foules soit en appartement privé.
Les nouveaux studios n’étaient pas encore très perfectionnés, il fallait tout inventer !
Pour les scènes tournées en intérieur, il n’y avait pas beaucoup de budget non plus pour s’offrir des éclairages artificiels.

Pour les costumes on utilisait pratiquement les mêmes vêtements qu’on adaptait à chaque nouveau film.

Toutes sortes de gens venaient dans ses studios pour se faire engager.
Acteurs de Vaudeville, des boxeurs, des lutteurs, d’anciens flics, des vieilles femmes, des enfants, des acrobates et autres personnages haut en couleurs et même des animaux domestiques ou sauvages et tous arpentaient les avenues des studios en attente de tourner.

La plupart des films de Mack Sennett avaient plus de succès pour la vente à l’étranger que sur place en Amérique, il faut dire que d’autres entreprises de cinéma commençaient à se développer aussi partout dans le monde.

La production des films était de l’ordre de 2 films par semaine ! Un film valant en moyenne 25 000 dollars, il fallait dépasser 50 000 dollars de recette en salle pour espérer un bénéfice.

Les studios Keystone étaient très affairés. Le comique est une affaire sérieuse et l’expérience montre que ce genre de films demandent une préparation méthodique et laborieuse. Ce concept toujours d’actualité, plus on investit dans l’écriture du scénario, moins le film coûte cher à produire et à tourner.

La composition d’une comédie de Mack Sennett est fondamentalement rationnelle par la structure de l’intrigue et la psychologie des personnages. Les histoires et les gags étaient réalisés sur mesure pour les acteurs auxquels ils étaient destinés. Il fallait donc en permanence les renouveler pour susciter l’intérêt du spectateur !

Revenons en maintenant au trajet de Charlie Chaplin et ses débuts chez Mack Sennett.

Il tournera 36 films avec la Keystone. Tous ont été sauvegardés, ce qui n’est pas le cas d’à peu près 90% des films muets de l’époque. Il n’y avait pas encore les cinémathèques qui conservent le patrimoine cinématographique. Un pan entier de ces films muets sont donc perdus à jamais cependant il arrive, de temps à autre, de retrouver des bobines très souvent en mauvais état voire usées. En 2010, un collectionneur a trouvé un film non répertorié de la Keystone où l’on voit apparaitre Charlie Chaplin.

En ce qui concerne la séance exceptionnelle du mardi 29 juin 2025 :

Le premier court-métrage (short en Anglais) présenté, a été tourné dans les studios de la Keystone. Le titre est « Caught in the rain », dont la traduction peut varier en français : « Un béguin de Charlot » ou « Charlot et la somnambule ». La durée initiale de ce film muet est de 11 minutes, ce qui est à peu près le cas pour la bobine projetée.
C’est le 1er film réalisé par Charlie Chaplin. Il en tournera bien d’autres par la suite.

Pour les quatre autres courts-métrages que nous avons présentés, deux d’entre-eux sont de la compagnie Essanay, et les deux suivants de la compagnie Mutual. La durée réelle de la version originale de chaque film est d’environ 25 minutes. En raison des affres du vieillissement, de l’usure suite aux passages dans les projecteurs, aux recollages, les versions projetées ce soir ont été volontairement écourtées, celles-ci sont sonorisées avec de temps à autre des sous titrages étrangers pour les intertitres. Attention, le fim peut casser en pleine projection.

Si nous en avons besoin, la colleuse permet de couper soigneusement le film, de le scotcher et de continuer la projection.

Bien entendu comme on remonte le temps, les moyens techniques de projection qui vous sont présentés dans cette salle, ne ressemblent pas aux projecteurs d’aujourd’hui permettant de visionner des fichiers numériques restaurés ou les défauts sont gommés au maximum.

Abordons maintenant le personnage inventé par Charlie Chaplin : Charlot.

Ne connaissant rien au cinéma quand il a été engagé par Mack Sennett, Charlie Chaplin est un garçon sérieux, il est très curieux de nature, il écoute, il observe tout le temps, parlant peu sauf pour poser des questions précises et professionnelles.

Son premier rôle à l’écran ne lui plait pas, il se mit donc en quête d’un nouveau personnage. Il essaya plusieurs accoutrements, des combinaisons de moustaches, des couvre-chefs, puis lui vint une idée lumineuse, venant de son vécu en Angleterre il pense à ses compatriotes arborant une moustache noire, un costume ajusté avec leur chapeau melon et leur canne en bambou.

Il décide de les prendre pour modèle mais en les tournant en ridicule.

Il endosse un pantalon trop grand, une veste étriquée, des grandes chaussures ainsi qu’un chapeau melon, une canne de bambou qu’il fait tournoyer par des moulinets. Il ne reste plus qu’avoir une démarche en canard en ayant les pieds écartés, un regard songeur, « le personnage est là ».

Il lui reste à trouver un petit nom, il choisit « Chas » en anglais. Nous, nous le connaissons sous le nom de Charlot.

D’ailleurs le nom de Charlot est resté dans le langage courant, on utilise Guignol ou Charlot qui veut dire à peu près la même chose aujourd’hui.

Le deuxième film de Charlie Chaplin projeté s’appelle « Kid auto races at Venice », je vous invite à le regarder sur Internet, on le trouve sur You Tube ou Daily motion gratuitement et même dans une version restaurée et colorisée.

Le personnage de Charlot apparait la première fois à l’écran et c’est un succès autant pendant le tournage que dans les salles de cinéma ! Son personnage fait mouche, Mack Sennett est persuadé qu’il va conquérir le public, il n’a pas tort et en 1914 sur une seule année, Charlot devient célèbre dans le monde entier.

Avec les films muets, Charlie Chaplin pouvait s’exprimer avec son corps, sa gestuelle, ses grimaces et ses mimiques dans un langage que chaque peuple pouvait comprendre, quel que soit leur langue : un langage universel.

En 1915 la compagnie Essanay lui propose un contrat qui lui permet de réaliser ses films avec une grande liberté. 

Ensuite il rejoint la compagnie Mutual ou il peaufine son personnage à merveille.

A partir des années 1920, les films deviennent des moyens-métrages d’à-peu-près une heure.

Il réalisera plusieurs films dont le plus connu est « le Kid » qui reçut un grand succès.

Il enchaine « La ruée vers l’or » qui est un triomphe mondial.

Nous n’allons pas tous les citer mais comme nous arrivons aux années 1930, la révolution sonore dans les salles de cinéma arrive et Charlie Chaplin doit s’adapter à cette nouvelle forme de cinéma.

Dans « Les temps modernes » il choisit de sonoriser son film mais toujours sans paroles.

Il choisit de chantonner avec des sons qui ressemblent à des mots qui donnent l’impression de mimer une langue universelle.

Il reprendra ce langage pour « Le dictateur » tourné en 1940 pour parodier le vrai dictateur Hitler qui avait l’habitude d’aboyer sur les foules pendant ses discours. Ce film devient aussi parlant.

En 1952 Charlie Chaplin est obligé de s’expatrier en Suisse à cause du Maccarthysme et de l’offensive moraliste suite à son dernier mariage avec une très jeune fille Oona O’Neill, (fille d’un dramaturge américain) dont il aura 8 enfants.

Il reviendra à Hollywood 20 ans plus tard pour recevoir un Oscar d’honneur.

Il achèvera la même année « Les feux de la rampe » dans son pays d’origine l’Angleterre, puis il enchainera encore deux autres films avant de mourir le soir de Noël 1977 en famille à Vevey en Suisse, il avait alors 88 ans.

Il nous laisse un héritage considérable pour les générations qui suivent et pour l’éternité.

Après la projection, nous aborderons les moyens techniques de l’époque et parlerons du documentaire qui va sortir prochainement, documentaire réalisé par sa petite-fille sur les origines gitanes de Charlie Chaplin.    

MF